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Séparation, perte et deuil : l’hypnose comme solution efficace d’accompagnement. Partie 2.

Dernière mise à jour : 12 déc. 2022

Marjorie Deleuze, Maître Praticienne en Hypnose Ericksonienne


L’idée que l’hypnose permet de se connecter à un monde plus spirituel fait partie de la « carte du monde » de nombreux clients. Il est important de travailler avec les croyances de nos clients sans jugement, dans le respect, et sans leur imposer notre façon de voir ou de croire. Face à l’incrédulité et à la gêne des proches, il est souvent plus facile de passer par l’hypnothérapeute pour partager une expérience de communication induite. Ces expériences sont aujourd’hui reconnues et catégorisées sous les acronymes de VSCD (vécu subjectif de contact avec un défunt) ou de CAD (communication avec les défunts). Les demandes de connexion avec un être décédé sont assez fréquentes dans ma pratique. Si j’ai été troublée à de nombreuses reprises par ce qui se déroulait, j’ai appris à accepter que certains phénomènes nous dépassent et qu’il faut laisser la porte ouverte aux expériences spirituelles, si telle est la demande du client. Notre imagination et notre verve d’hypnothérapeute nous permettent d’accompagner grâce à de nombreux protocoles de pardon, d’adieu, de messages échangés. Ce qui se passe appartient au client, l’important est que cela lui permette d’avancer vers l’objectif qu’il s’est fixé (perte de poids, acceptation de la disparition de l’autre, refaire sa vie...). Comme le dit Valérie Roumanoff, « il s’agit de devenir acteur de sa vie plutôt que spectateur de son malheur. »


Notre rôle d’hypnothérapeute doit être celui d’un facilitateur d’action. Nous ne sommes pas là pour faire parler du passé pendant de longues heures, comme d’autres professions le feraient, mais bien pour impulser un mouvement vers l’avant. Lorsque le malheur s’abat sur la personne, elle a tendance à focaliser sur les aspects négatifs de sa vie. Grâce à l’hypnose et aux techniques de transfert de compétences et de mobilisation des ressources, nous pouvons faciliter une forme de focalisation sur le positif et de ce fait, permettre l’acceptation progressive de la perte. Selon Roumanoff, il existe trois étapes pour se sortir de la tristesse et des états dépressifs : prendre conscience que nous sommes acteurs de notre propre souffrance, se libérer de cette souffrance et opter pour le bonheur. Mais avant tout, il faut accepter les émotions qui se présentent à nous. C’est parce que les émotions sont refoulées que des blocages se mettent en place. Nos émotions nous envoient des messages, elles nous permettent d’attirer l’attention sur ce qui est important pour nous : nos valeurs, notre identité, nos besoins, nos désirs, notre place dans ce monde et dans nos différents « systèmes » (familial, professionnel, couple...).


Les émotions sont pour moi des impulsions de vie, elles sont nécessaires à chaque étape de l’accompagnement. Dans le cas de la tristesse liée à la perte de quelqu’un ou d’un état, Roumanoff souligne que « le message peut être d’apprécier ce qu’on a eu et ce qu’on a actuellement, car souvent, on accorde de l’importance aux choses quand elles ne sont plus là. » C’est le manque qui amène à la prise de conscience. Cette émotion, accueillie et traversée, impulse alors la motivation à mettre en place des actions pour combler ce manque et pour prendre la décision de réorganiser sa vie. L’hypnose permet justement de se reconnecter à soi et de dépasser les limites que nous nous sommes imposées. « Avec l’hypnose, on devient libre de choisir qui on est. », nous rappelle Roumanoff.


Dans ma pratique, j’ai également remarqué combien il est important d’amener de la consolation, en maintenant un certain cadre. Cette consolation est permise par l’empathie, la compréhension de la souffrance. Il est préférable néanmoins de ne pas tomber dans la compassion, qui implique une souffrance partagée. A mon sens, l’hypnothérapeute doit rester à l’écoute sans se laisser envahir par ses propres émotions. Les séances de supervision permettant la décharge émotionnelle seront plus appropriées et parfois nécessaires. Le client est là pour lui, non pas pour assister aux états d’âme de son thérapeute. Il a besoin qu’on le comprenne pour pouvoir être guidé, et c’est aussi par son attitude contenue que l’hypnothérapeute lui permet d’atteindre l’apaisement. La consolation reçue permet, selon Christophe André, une « remise en lien avec le monde ». Le client n’est plus seul dans son mode de pensée, il vient s’en décharger et reçoit en échange une perspective modifiée sur son avenir. L’hypnothérapeute doit être une figure de soutien et de consolation de qualité.


Les prescriptions de tâche peuvent participer à instiller de la consolation. Sophie me dit qu’elle n’accepte pas le décès brutal de sa mère. Le cœur a lâché, alors qu’elle était avec elle deux heures plus tôt en pleine forme. Impossible de se rendre au cimetière depuis, ce serait reconnaitre qu’elle n’est plus là. Après un travail de visualisation d’appartenance à deux mondes différents, je lui propose qu’elle se rende (sous hypnose) au cimetière. A l’issue de la séance, la prescription de tâches a consisté à s’y rendre véritablement et de préparer un rituel de remerciement à l’égard de sa mère, afin d’enclencher la phase de recherche de lien. La cliente, soulagée et libérée d’un poids, s’est alors sentie prête à faire le pas pour avancer le processus de deuil. Dans ce cas, une visualisation travaillée ensemble aura permis de franchir une étape inconcevable quelques minutes auparavant.


Par l’hypnose, nous pouvons aussi reconnecter l’individu aux petites choses du quotidien qui consolent : les êtres qui les rendent heureux, l’art, la beauté, le contact avec la nature, l’amitié, l’amour, les activités physiques épanouissantes… tout ce que Christophe André appelle « la vie qui guérit ». En allant chercher les forces et les ressources de la personne, l’hypnothérapeute permet d’enclencher des mécanismes d’autoconsolation. Il y a bien sûr les voyages hypnotiques dans le cadre du cabinet, mais aussi les prescriptions de tâches qui permettent d’autonomiser le client. On interroge les activités quotidiennes, les passe-temps, les sensibilités artistiques et oriente la prescription de tâches en fonction. L’art me semble avoir une place spéciale dans cette dynamique de consolation et de deuil, comme l’explique Christophe André :

« L’art peut d’abord nous consoler en captant notre attention et en la détournant un moment de nos ruminations/ parce que c’est beau, ou inhabituel, ou habituel mais sous un angle neuf … L’art peut ensuite nous faire éprouver des émotions agréables (admirer, s’étonner, s’attendrir) qui vont affaiblir l’emprise de nos émotions douloureuses. (…) L’art peut aussi nous consoler en nous décentrant de nous-même, en nous mettant en lien avec d’autres humains souffrant, comme nous, ou différemment de nous ; dans ces cas-là, ce n’est pas seulement l’admiration qui nous réconforte, pas seulement le beau, mais le touchant, ce qui dans l’art rejoint notre propre peine et, nous le comprenons alors, celle des autres humains. »


Lecture, peinture, musique, théâtre, cinéma… que ces activités soient pratiquées ou simplement vécues par le ressenti, il est important de comprendre la sensibilité du client pour lui donner des pistes de consolation. L’art est un exutoire particulièrement efficace pour atténuer les peines et défocaliser de sa souffrance. C’est un outil puissant, sous hypnose comme en prescription de tâches.


Si l’hypnothérapeute maitrise l’art de la suggestion, il peut aussi amener le client à pratiquer l’autosuggestion. Tous les spécialistes de la question du deuil sont unanimes sur la souffrance : nous nous l’infligeons à nous-mêmes. Cela parait facile à dire et pourtant, ce sont bien nos pensées ruminantes qui façonnent notre manière d’appréhender un événement malheureux. Victime, nous devenons très vite notre propre bourreau. Sans jamais culpabiliser l’état de souffrance, l’hypnothérapeute peut aider à cette prise de conscience et permettre à l’individu de s’autonomiser par des pensées constructives et plus positives. Lorsque j’ai perdu mon frère, je me suis répété en boucle qu’il était plus heureux là où il se trouvait désormais. Cette autosuggestion m’a permis de ne pas m’apitoyer sur ma perte, mais plutôt de me centrer sur le soulagement, pour lui. Certains pourront y voir une manifestation de croyance en un au-delà, mais peu importent finalement les croyances, il s’agit de transformer le malheur ressenti en espoir (je me convaincs qu’il est mieux où il est), en gratitude (merci pour le bout de chemin parcouru ensemble et tout ce que nous avons partagé), en nouveaux apprentissages (je vais être plus attentive aux besoins et à la souffrance des autres), en sagesse (apprécier chaque instant avec les êtres chers) …


L’hypnose est donc une pratique puissante et particulièrement efficace pour accompagner le deuil, la perte et les transitions de vie. Nous avons à notre actif toute une panoplie d’outils qui permettent de répondre aux divers besoins du client tout en respectant le processus de deuil (voyages hypnotiques, communication induite, prescriptions de tâches, changements de perspectives, protocoles de pardon, de gratitude, d’adieu, apprentissages d’autosuggestions tournées vers la vie et la positivité…). En gardant à l’esprit la nécessité de connaitre les diverses étapes du deuil pour accompagner efficacement et dans le respect du cheminement propre au client, l’hypnothérapeute peut être un véritable soutien et apporter une consolation réparatrice et constructive pour amener le client à vivre plus sereinement.


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